Bien étalé sur la table à café: l’album. Deux grandes photos lustrées par page, une matrice 4×4 à la gloire d’un même sujet. Comme si Warhol s’était épris d’un taureau plutôt que de Marilyn et du mouvement plutôt que de la couleur. À chaque photo, une victime différente dans un habit semblable, une victime colorée inscrite dans l’air en un joyeux désordre de membres. Et au-dessous, sur chaque photo, la masse noire du taureau, compacte, la puissance invaincue exprimée en une tache insondable: un bloc, un roc sculpté par le vent, une falaise trapue de laquelle le torero prend son envol involontaire, figé pour la postérité en un simple déclic. Quand la bête sera vieille, affaiblie par les piques du temps, il lui restera ce réconfort, cet album de ses années d’artiste où elle faisait de l’homme son matériau.